Abécédaire Imaginaire de l’Intelligence Artificielle – Cognition et Esprit Critique
Gobéria
/go.be.ʁja/
n.f. Tendance à accepter sans esprit critique les informations et réponses fournies par les systèmes d’intelligence artificielle, comme si leur origine technologique leur conférait une autorité supérieure à celle des sources humaines.
La gobéria se répand dans les entreprises où les présentations truffées de données générées par IA sont acceptées sans vérification, simplement parce qu’elles paraissent sophistiquées et objectives.

« Pour lutter contre la gobéria ambiante, certains professeurs exigent désormais des sources primaires pour tous les travaux académiques. »
« Cette forme de gobéria collective explique pourquoi des hallucinations d’IA peuvent rapidement devenir des ‘faits’ partagés. »
« La gobéria touche particulièrement les décideurs pressés qui avalent sans mastication les analyses produites par leurs outils d’IA. »
Fusion ingénieuse de « gober » (avaler sans critique) et « IA« , ce terme capture l’essence d’un phénomène cognitif troublant de notre époque : cette propension à accorder une confiance démesurée aux outputs des intelligences artificielles, comme si l’origine algorithmique d’une information garantissait sa véracité ou sa pertinence.
La gobéria se distingue de la simple crédulité par son caractère paradoxal et spécifique aux technologies. Nous sommes souvent plus méfiants envers les affirmations de nos semblables qu’envers celles produites par des machines que nous savons pourtant faillibles et entraînées sur des données potentiellement biaisées. Cette forme particulière de suspension du jugement critique s’explique par plusieurs facteurs : l’aura d’objectivité associée aux machines, l’impression de sophistication technique, et ce que les psychologues nomment le « biais d’automatisation » – notre tendance à faire davantage confiance aux systèmes automatisés qu’aux humains.
D’autres termes comme « naïvegorithmie » (fusion de « naïveté » et « algorithme ») ont été proposés pour décrire ce phénomène, mais « gobéria » s’est imposé pour sa concision percutante et sa capacité à évoquer visuellement l’action d’avaler sans discernement les informations générées par l’IA. Sa richesse grammaticale, avec les dérivés « gobériac » et « gobériatique« , permet d’exprimer différentes facettes du concept, de l’attitude individuelle aux mécanismes sociaux plus larges.
La gobéria représente l’un des défis majeurs de l’éducation à l’ère numérique. Alors que la biaisonnance amplifie les partialités présentes dans les données, c’est la gobéria qui nous empêche de les reconnaître et de les questionner. Cette crédulité technologique risque d’éroder progressivement notre capacité collective à distinguer le vrai du vraisemblable, le factuel du plausible, nous rendant vulnérables à une forme sophistiquée de désinformation algorithmique.
Avez-vous déjà observé des comportements chez vos proches, ou vous êtes-vous surpris vous-même à accorder une confiance excessive aux réponses d’une IA simplement parce qu’elles étaient présentées avec assurance et cohérence apparente ?
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